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Fêter et faire mémoire

Chers frères et sœurs, bonne fête du Jeudi Saint. Je vous dis bonne fête car ce soir nous fêtons le Seigneur, nous fêtons le jour où Jésus a institué l’eucharistie et il a institué les prêtres. L’autel est dressé. Il est décoré. Tout est prêt pour les noces de l’agneau comme on dit pendant la messe. Tout est prêt pour le repas de fête. Mais que fêtons-nous exactement ? Quand Jésus fonde l’eucharistie, autrement dit, quand il crée la messe, il se donne lui-même. Nous fêtons le don de sa vie. L’eucharistie, que l’on appelle aussi la messe est la source de toute vie chrétienne parce que c’est là que Dieu se fait nourriture pour nous. La première lettre aux corinthiens nous le rappelle « Ceci est mon corps, qui est pour vous. (…) Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang. » C’est donc dans l’Eucharistie que nous recevons la force dont nous avons besoin pour continuer notre route à la suite du Christ. Quand Jésus se donne en nourriture c’est pour nous donner sa vie afin que nous fassions partie de la sienne. Alors aujourd’hui nous voulons le remercier pour ce don, pour cette fête pour cette invitation à faire partie de sa vie.

Nous faisons la fête mais pas seulement. Nous faisons aussi mémoire. C’est ce que déclare le premier verset du livre de l’Exode : « Ce jour-là sera pour vous un mémorial ». Ce fameux jour sera inscrit dans la mémoire collective. Il sera rappelé d’année en année. Oui, le peuple d’Israël se souvient de cette expérience fondatrice. Il fait mémoire du fait qu’il était réduit en esclavage, et que Dieu l’a délivré de la mort. Et ce soir-là, alors que Dieu désirait porter secours à son peuple, il a demandé sa collaboration. En effet, on nous rapporte que tous étaient impliqués afin d’organiser le repas de départ : tuer l’agneau, préparer le pain sans levain et les herbes amères, puis manger debout en toute hâte. Une coopération pour le salut de tous. Quant à la première lettre adressée aux Corinthiens, elle rappelle également ce qui s’est passé. Elle fait mémoire de cette dernière soirée où Jésus a donné sa vie dans un partage symbolique du pain et du vin. « Faites cela en mémoire de moi » Chaque année, ce signe sera répété afin de nous rappeler que c’est par amour que Jésus a donné sa vie pour chacun d’entre nous. Et c’est exactement ce que nous faisons tous les dimanches et c’est également ce que nous accomplissons ce soir. Nous nous souvenons du sacrifice de Jésus pour toute l’humanité.

L’amour se traduit toujours concrètement

Ainsi donc, nous faisons mémoire. Cependant, il est important de ne pas se limiter au passé. En réalité, cette célébration en l’honneur du Seigneur nous incite à agir et plus particulièrement à travers le service des autres. Lors de ce repas, lorsque Jésus lave les pieds des apôtres, c’est Dieu lui-même, qui de ses propre mains, lave les pieds des hommes. Dans ce geste, Jésus nous montre combien il aime l’humanité toute entière. Il est celui qui s’abaisse pour se faire proche de ceux qui souffrent, des petits, des blessés et même des pécheurs. Les mains de Dieu lavent les pieds des hommes, pour que le cœur des hommes puisse être touché par l’amour doux et humble du cœur de Dieu pour eux, pour nous, pauvres pécheurs. Si donc le Seigneur Jésus a lavé les pieds de ses disciples c’est pour nous enseigner que l’amour se traduit toujours concrètement : « C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. » Puisqu’il s’agit ce soir de faire mémoire, rappelons-nous que c’est l’amour qui est au cœur de notre foi. Et c’est ce même amour qui devrait nous faire agir dans le concret de nos vies. C’est toujours enrichissant de s’investir au service de tous, en particulier des plus petits. De soutenir ceux qui pleurent, de réconforter ceux qui éprouvent de la souffrance, d’être compagnon de route de ceux qui progressent dans la vie humaine ou spirituelle. Et puis n’oublions pas qu’il y a plus de joie à servir qu’à être servi. La joie du Seigneur au soir du jeudi saint est palpable. La joie de l’amour donné, partagé, transmis. Ainsi, de génération en génération, nous nous souvenons joyeusement de ce geste d’amour qui en appelle d’autres.

Alors chers amis, en cette veillée du Jeudi saint, gardons en mémoire que nous recevons l’amour de Dieu pour devenir capable à notre tour de l’aimer et d’aimer ceux dont nous croisons la route. Dans quelques minutes je vais laver symboliquement laver les pieds de mes frères et sœurs. Je le ferais en mon nom mais aussi au nom de toute notre assemblée afin que cela soit signe pour chacun dans sa vie quotidienne. Seigneur, donne-nous de t’aimer et de te suivre dans ton amour pour chacun. Donne-nous de les aimer, proches et lointains, comme tu les aimes, un amour qui s’éprouve et se prouve.

Tristan Taillasson, spiritain à Saverne