« La prière fervente, ferment d’espérance »
Homélie du dimanche, 19 octobre 2025 de Landry N’nang Ékomie, spiritain à Saverne
Nous clôturons aujourd’hui la semaine missionnaire mondiale.
Le thème qui nous a été proposé de méditer est : « missionnaires de l’espérance parmi les peuples ». Comment les textes de ce dimanche nous aident-ils à témoigner dans notre monde de l’espérance qui nous habite ? On peut observer une certaine complémentarité dans ces textes.
La première lecture et l’évangile insistent sur la prière tandis que l’épitre à Thimoté parle de droiture doctrinale dans notre témoignage. L’intérêt de la 1e lecture n’est pas la scène de combat entre les Israélites et les Amalécites qu’elle raconte. Mais l’attitude, la relation à Dieu dans l’épreuve et comment la prière fervente de toute la communauté peut faire naître l’espérance, aidant à braver ensemble les épreuves, les situations dites perdues d’avance. Dans le combat qui oppose Israël aux Amalécites, la prière joue un rôle fédérateur. Chaque maillon du peuple est impliqué, chacun selon son niveau de compétence. La leçon du texte se trouve alors dans l’attitude qui suscite l’espérance : la volonté de faire ensemble, de s’unir pour porter ensemble une même cause, de s’en sortir ensemble. Le miracle de l’espérance chrétienne dans notre monde qui tend à se fractionner peut résider dans le fait qu’un chrétien n’espère pas seul dans son coin. Cela change tout : changer notre regard sur les situations difficiles de la vie. Regarder le cours des événements en solidarité les uns avec les autres mais surtout avec le recul et la patience qu’exige la confiance en Dieu. L’espérance suscite la communauté, c’est une force mobilisatrice. Une communauté qui espère, c’est une communauté qui se mobilise et chemine ensemble, traverse ensemble les difficultés et se réjouit ensemble.
Une communauté qui se nourrit quotidiennement de la Parole de Dieu est suffisamment équipée pour rassurer le monde et unir les peuples entre eux
Pour parvenir à garder l’unité qui suscite l’espérance, St. Paul nous conseille d’être « ferme » dans la « doctrine ». Or, la fermeté et la doctrine sont des mots caduques et impopulaires aujourd’hui. Que faut-il entendre par là ? Comment la fermeté doctrinale peut-elle être ferment d’espérance aujourd’hui ? La fermeté exigée est celle qui vient des Écritures. St. Paul dit qu’elles doivent équiper l’homme de Dieu « pour faire toute sorte de bien » et « dénoncer le mal ». Il ne s’agit guère de tenir à des règles ou de faire l’avocat de Dieu dans un monde où le mot Dieu ne dit plus grand chose. Il est au contraire question de se familiariser avec la Parole de Dieu pour persévérer et croître dans le bien. Il s’agit de se nourrir de la Parole de Dieu pour être nourrissant pour le monde. Une communauté qui se nourrit quotidiennement de la Parole de Dieu est suffisamment équipée pour rassurer le monde et unir les peuples entre eux, recoudre le tissu du monde et de la fraternité là où il s’est déchiré.
Pour finir, on peut se servir de la structure de l’évangile de Luc pour comprendre son message. L’évangile de ce dimanche se situe dans la section qu’on peut intituler la « monter à Jérusalem ». Luc présente une veuve victime d’injustice. A force d’insistance elle obtient réparation. Il est important de rappeler que la marche vers Jérusalem coïncide avec la « gestation » de l’Eglise et la formation des disciples. Jésus invite ainsi les disciples à persévérer dans la prière et à adopter l’espérance comme attitude de résistance non violente dans l’adversité. Ainsi, l’espérance donne forme à la foi chrétienne parce qu’elle nous prémunit contre toute tentation de répondre à la violence par la violence. Contre la violence, l’espérance chrétienne enseigne la patience lucide. Face à l’injustice, l’espérance nous fait emprunter des chemins d’humanité pour que l’injuste ne soit considéré comme un adversaire, un ennemi mais comme un frère pour qui je dois prier, une sœur pour qui ma résistance non violente face au mal doit servir d’exemple.