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Dans les églises aujourd’hui, la lecture de l’Evangile commence au milieu, au deuxième paragraphe : avec la prière des disciples : « augmente en nous la foi ! ».
Mais pourquoi les disciples sont-ils pris tout à coup de cet ardent désir que Jésus augmente leur foi… ?
En fait, ils sont pris de panique devant ce que Jésus vient de leur dire… et qui leur semble totalement impossible et incroyable !
En fait, l’Evangile de ce dimanche forme un tout avec ce qui le précède immédiatement… Et ce tout c’est l’équivalent du discours de Jésus sur l’Eglise dans l’Évangile selon Saint Matthieu. Jésus vient de leur dire que leur communauté, son Eglise doit être une communauté vraiment fraternelle où l’on pardonne sans mesure et où l’on respecte les « petits » de manière inconditionnelle. Mais cela semble radicalement farfelu et impossible aux disciples…
Vous voyez, c’est là aujourd’hui le nœud du problème… Ce serait tout de même dommage de rater cela complètement pour s’appesantir sur la parole sur la foi. Cet enseignement de Jésus sur l’Eglise, il nous faut, particulièrement aujourd’hui, toujours le recevoir en pleine figure… et essayer de faire la vérité dans nos comportements.


Le véritable scandale, ce n’est pas d’abord notre manque de foi… bien que notre situation ne soit pas bien brillante… Le véritable scandale de la part de la communauté de Jésus, c’est le non-respect des petits, des faibles, nos manques de pardon et de générosité.

Pourquoi Jésus parle-t-il ainsi ? Mais parce qu’il vient de raconter la parabole du mauvais riche et du pauvre assis à sa porte, du riche qui, même au ciel, demande encore des privilèges… : « envoie Lazare à mes frères… ! » Le véritable scandale, c’est le mépris des petits… dont tant de comportements en Eglise sont l’humiliant témoignage… Le véritable scandale, c’est le manque de fraternité, de dialogue, de pardon, de débat, de correction fraternelle dans la charité et la compréhension….

Jésus est dur : « Malheureux… »… C’est que c’est grave si on amène un frère au précipice ! Combien de gens se précipitent en-dehors de l’Eglise parce qu’ils ont été scandalisés !?). il vaut mieux être soi-même précipité dans ce précipice… Le bon comportement, c’est la correction fraternelle et le pardon illimité des offenses… C’est ce qu’on essaie de pratiquer dans les monastères… Le pratiquons-nous dans nos communautés ?

Un appel à s’ouvrir à la toute-puissance de Dieu

Cela semblait tout à fait impossible aux disciples de Jésus (ils n’avaient pas encore reçu l’Esprit Saint à la Pentecôte ! !)… au point qu’ils le supplient d’augmenter leur foi… pour qu’ils puissent parvenir à « croire » à des choses pareilles… Nous devrions peut-être faire la même prière ?!
Jésus se moque d’eux gentiment… Il leur dit : « Votre Foi ??? Justement, vous n’en avez aucune… même pas comme un grain de Sénevé… »
Vous ne manquez pas de croyances… sur Dieu et sur tout le reste… Des croyances qui vous semblent essentielles… Mais de la foi ?… De la confiance vraie en Dieu qui lui seul peut accomplir ce qui est impossible à l’homme… Ça… vous en manquez encore totalement… La foi même humble est un don de Dieu : ce qui semble impossible aux humains, Dieu peut le réaliser en eux… C’est un appel à s’ouvrir à l’action toute puissante de Dieu… Lui seul est le maître de l’impossible… Lui seul peut nous guérir… et guérir l’Eglise. Demandons-nous suffisamment ce DON de la foi ?
Mais dans quel cœur le petit grain de la foi… peut-il prendre racine et pousser ? Justement, dans le cœur de ceux qui sont devenus petits, serviteurs au sein d’une communauté fraternelle… C’est ce que Jésus veut nous dire dans la petite parabole du maître et du serviteur… N’en faisons pas une apologie du maître et de l’esclave, ce n’est surement pas le propos du Seigneur ; mais une juste reconnaissance de la grandeur de Dieu qui seul peut nous donner la foi et de notre nécessaire humilité pour l’accueillir…. Celui est loin d’être simple pour l’homme «moderne » !

Prendre le rang de serviteur

Comme toujours, Jésus déplace les curseur… toujours dans le même sens… celui de l’appel à une vraie conversion de mentalité… d’une radicale conversion des relations avec le divin et avec les autres : cesser de se comporter comme le maître qui se fait obéir au doigt et à l’œil par ses serviteurs… Il appelle ceux qui ont une parcelle d’autorité… de responsabilité, de « hauteur » sur les autres … à s’en débarrasser… à prendre le statut de serviteur… de sans-droit…
Si nous voulons vivre selon le commandement du Seigneur… il nous faut, comme lui-même d’ailleurs… prendre le rang de serviteur inutile, sans prestige, ni avantage personnel…


Nous le savons, cela est loin d’être évident… Nous ne sommes pas programmés de cette façon… nous réagissons et agissons inconsciemment selon une toute autre logique… Jésus en personne s’est fait petit et serviteur : demandons-lui la grâce de pouvoir en faire autant.

Jean Pierre Buecher, spiritain au Centre saint Florent à Saverne en Alsace